mardi 30 décembre 2008

La pensée archipélique de Glissant (bis)

"La pensée archipélique convient à l'allure de nos mondes. Elle en emprunte l'ambigu, le fragile, le dérivé. Elle consent à la pratique du détour, qui n'est pas fuite ni renoncement. Elle reconnaît la portée des imaginaires de la Trace, qu'elle ratifie. Est-ce là renoncer à se gouverner ? Non, c'est s'accorder à ce qui du monde s'est diffusé en archipels précisément, ces sortes de diversités dans l'étendue, qui pourtant rallient des rives et marient des horizons. Nous nous apercevons de ce qu'il y avait de continental, d’épais et qui pesait sur nous, dans les somptueuses pensées de système qui jusqu'à ce jour ont régi l'Histoire des humanités, et qui ne sont plus adéquates à nos éclatements, à nos histoires ni à nos non moins somptueuses errances. La pensée de l'archipel, des archipels, nous ouvre ses mers." (Glissant. Theorie du Tout monde, p. 31).

L’archipel de Glissant

«Nous nous apercevons de ce qu’il y avait de continental, d’épais et qui pesait sur nous, dans les somptueuses pensées du système qui jusqu’à ce jour ont régi l’Histoire des humanités et qui ne sont plus adéquates à nos éclatements, à nos histoires ni à nos non moins somptueuses errances. La pensée de l’archipel, des archipels, nous ouvre ces mers.»
Traité du Tout-Monde

«Quelle est cette splendeur ? D’un bord à l’autre de la parole établissant ses paysages ?» Pour le poème «Le grand midi», dans Le Sel noir, où elle est posée, cette question est sans doute purement rhétorique. La réponse était déjà donnée dans une strophe précédente:«Cette île, puis ces îles tout-unies, ô nommez-les. «Criez-les. Je ne veux en la mer qu’un pli d’argiles qui épient. Toute une écume terrassée.» Une mer peuplée d’îles: tel est le lieu où se plaît l’imaginaire du poète. Ce que la langue appelle un archipel. Lieu paradoxal, qui conjoint l’isolement de l’île et la mise en relation de l’ensemble. Mais lieu qui s’accorde parfaitement à la poétique de la Relation. «L’avantage d’une île est qu’on peut en faire le tour, mais un avantage encore plus précieux est que ce tour est infinissable.»

Car la plupart des îles du monde sont reliées en archipels. Chaque île appelle à la relation avec d’autres îles.Le Traité du Tout-Monde érige «l’archipel» en opérateur conceptuel. D’ailleurs le mot s’enrichit de dérivés: «archipélique», «archipéliser». L’archipel oppose sa pluralité, «ses diversités dans l’étendue», à l’esprit de système et sa rigueur unitaire : «La pensée archipélique convient à l’allure de nos mondes. Elle en emprunte l’ambigu, le fragile, le dérivé. Elle consent à la pratique du détour, qui n’est pas fuite ni renoncement. Elle reconnaît la portée des imaginaires de la Trace, qu’elle ratifie.»

L’archipel est d’abord un lieu de la géographie: les réalités de l’archipel caraïbe ont proposé à Glissant le cadre et la matrice de sa pensée du divers. Puis l’image de l’archipel s’est accordée à la conscience de la métamorphose du monde: «Les régions du monde deviennent des îles, des isthmes, des presqu’îles, des avancées, terres de mélange et de passage, et qui pourtant demeurent.» Même la Méditerranée, où se sont développés les grands monothéismes et la pensée de l’Un (maintenant en proie aux crises et aux guerres où s’affrontent leurs incarnations trop humaines), «s’archipélise à nouveau, redevenant ce qu’elle était peut-être avant de se trouver en prise à l’Histoire». Dans la mondialité féconde du Tout-Monde, «aujourd’hui le monde entier s’archipélise et se créolise».L’archipel devient la forme même du monde. Rien d’éton-nant si l’œuvre de Glissant qui veut en rendre compte se soit développée comme une œuvre en archipel. La pluralité et le disparate y sont affichés comme principes constituants mais tous les livres font relation les uns avec les autres, débordent les uns sur les autres.

Chaque livre-île se distingue de tous les autres par son projet ou son écriture, irréductible dans sa singularité, mais il tient aux autres par des rappels ou des reprises. Les mêmes vagues viennent battre leurs rivages.Dans le Traité du Tout-Monde, le fragment intitulé «Le nom de Mathieu» donne un exemple de nomadisme insulaire avec l’usage que l’écrivain fait des noms: «Ces noms que j’habite s’organisent en archipels. Ils hésitent aux bords de je ne sais quelle densité, qui est peut-être une cassure, ils rusent avec n’importe quelle interpellation qu’infiniment, ils dérivent et se rencontrent sans que j’y pense.» Ainsi le nom de Mathieu: nom de baptême de l’écrivain, repris dans la fiction pour l’accorder à un personnage majeur des romans, Mathieu Béluse, «greffé, pour finir ou pour recommencer, en Mathieu Glissant», l’enfant dernier-né de l’écrivain.

Sur le site: http://www.culturesfrance.com/adpf-publi/folio/glissant/index.html

lundi 29 décembre 2008

Mauvais poeme

Tu te souviens d’une île ?
un cygne avec sa cigogne
de ta solitude
ton cœur en rogne
de ta gratitude
envers cette ile gigogne
tes grains d’inquiétude

Source oubliée (et ca vaut mieux pour lui)

Sur la balance

« le but de l’état nomade n’est pas de fournir au voyageur trophées ou emplettes mais de le débarrasser par érosion du superflu, c’est dire de presque tout. Il rançonne, étrille, plume, essore et détrousse comme un bandit de grand chemin mais ce qu’il nous laisse “fera le carat” ; personne ne nous le prendra plus. On se retrouve réduit et allégé. Pour un temps seulement : la légèreté est aussi volatile que précieuse et exige d’être courtisée et reconquise chaque jour. De retour à l’état sédentaire — qui a lui aussi ses “moyens libératoires” — il faut veiller à ne pas reprendre cette corpulence et cette opacité qu’on se flattait d’avoir perdues » (Bouvier, 2004, p. 1061).

Le livre tibétain de la vie et de la mort

Et de deux! Un compagnon de voyage aussi important qu'un Bouvier. Depuis le temps que je veux plonger un peu plus dans la culture bouddhiste.

dimanche 28 décembre 2008

L'écrivain et le politologue. Fable

"Contribuer à changer la mentalité des humanités, abandonner le 'si tu n'es pas comme moi tu es mon ennemi, si tu n'es pas comme moi je suis autorisé à te combattre': c'est une des fonctions du poète, de l'artiste, que de contribuer à renverser cet ordre des choses. Ne plus s'en remettre seulement à l'humanisme, à la bonté, à la tolérance, qui sont fugitifs, mais entrer dans les mutations décisives de la pluralité consentie comme telle. Cela va prendre beaucoup de temps mais dans la relation mondiale aujourd'hui, c'est une des tâches les plus évidentes de la littérature, de la poésie, de l'art, que de contribuer peu à peu à faire admettre 'inconsciemment' aux humanités que l'autre n'est pas l'ennemi, que le différend ne m'érode pas, que si je change à son contact, ce la ne veut pas dire que je me dilue dans lui."
Edouard Glissant, Introdution à..., p. 43.

L'artiste agit en s'approchant de l'imaginaire du monde, une utopie que les politiciens n'osent même pas esquisser. Et cela est d'autant plus important dans une époque où les idéologies dominantes vacillent. Une place se libère. "Ce n'est pas là rêver le monde, c'est y entrer." dit Glissant

Du particularisme caraibéen à la théorie du divers

"Il est probable que la créolisation linguistique opère mieux sur des territoires exigus et bien délimités: des îles, organisées ou non en archipels (Caraibes, océan Indien, îles du Cap-Vert). En quelque sorte, des laboratoires. Ces hypothèses ne portent pas crédit de la créolisation française, comme on a voulu le croire ou me le faire supposer. [...]

C'est pour ces raisons que je pense que le terme de créolisation s'applique à la situation actuelle du monde, c'est-à-dire à la situation où une 'totalité-terre' enfin réalisée permet qu'à l'intérieur de cette totalité, les éléments culturels les plus éloignés et les plus hétérogènes puissent être mis en relation et que cela produit des résultats imprévisibles"
Edouard Glissant, Introduction à une poétique du divers, p. 19

Il avait dû fumer Glissant ce jour-là. Elle est òù la totalité-terre? Dans la logique de libre marché hérigée à l'échelle planétaire? Et la rencontre d'éléments hétérogènes? Dans le mur américano-mexicain? L'implantation de Maquiladoras qiu permet la rencontre des ingénieurs américains avec la main d'oeuvre bon marché mexicaine que les États-Unis exploitent? Dans ces nouveaux villages de riches hyper sécurisés et gardés par des vigiles pour être certain de ne pas rencontrer la misère? Dans l'écran d'ordinateur qui prétend nous mettre au contact de tout mais nous montre une image virtuelle et selectionnée, et nous enferme dans l'espace fermé de nos appartements?

Sans rapport: Le Quebec aussi se sent laboratoire de la postmodernité.

Ambivalence d'insulaire

"Les insulaires entretiennent un étrange rapport avec la mer. Elle les isole dans leur singularité mais leur offre aussi la possibilité d'échapper à la précarité."
Emile Olivier, Repérages, p. 18

"D'une part, un furieux amour de ce coin de terre, car mon île n'est pas seulement une unité géographique, elle est un lieu où l'on rêve, où le regard se perd puis se retrouve. La mer la délimite si bien que l'on voudrait, d'un seul coup d'oeil, pouvoir l'embrasser, en faire le tour. omn île porte en elle l'infini. Elle est faite de sables et de mornes, de plaines, de vallées et de crètes rocheuses. J'ai si souvent, du rivage, contemplé l'immensité de l'océan, médité en pensant au néant des sables que mes yeux gardent encore la couleur de la mer et le mouvement de ses vagues dans l'infini naissant. Combien de fois, immobile devant elles, ai-je cru résoudre le problème qui longtemps encore tourmentera les insulaires: effacer la mer."
Emile Olivier, Repérages, p. 19

Dans cet essai, Emile Olivier raconte qu'il y eut un candidat à la présidence d'Haïti, totalement oublié maintenant, dont le programme était de construire un pont entre Port-au-Prince et l'île de Gonave.

Et de un!

"Pendant 20 ans, il n'avait pensé qu'à son retour. Mais une fois rentré, il comprit, étonné, que sa vie, l'essence de sa vie, son centre, son trésor, se trouvait hors d'Ithaque, dans les 20 ans de son errance. et ce trésor, il l'avait perdu et n'aurait pu le retrouver qu'en racontant." Kundera, L'ignorance.

Ça me fait penser à la chute de La plaisanterie, quand le héros rate de façon grotesque et dramatique la vengeance qu'il préparait depuis 20 ans, vivant depuis l'événement dans l'aigreur du souvenir alors que son tortionnaire, il le découvre comme un claque, a tout oublié du drame. Kundera est un habitué de l'exil et de l'attente. Des renversements carnavalesques aussi.

C'est le premier livre que je vais emporter avec moi. Il m'attend depuis des mois sur le coin de mon étagère et je sens qu'il se mariera bien à mon état d'esprit. Puis il me faut des livres de poche, sans valeur financière ni sentimentale, car je dois pouvoir les abandonner ou les troquer contre d'autres. Trois maximum. Si on compte les guides de voyage et les manuels de langue, il faut peut-être réduire à 2. Ahhh, deux livres pour trois mois. Inimaginable.

Mon île des fous

"Nous sommes tous des Caraibes aujourd'hui dans nos archipels urbains. Peut-être n'y a-t-il plus personne aucun retour possible dans un pays natal - seulement des notes de terrain pour le réinventer."
James Clifford, Malaise dans la culture

À une époque où la solitude était ma plus grande compagne, et les rencontres bouleversantes ne parvenaient pas à ne pas être éphémères, je m'étais inventé un petit conte naïf. Une sorte de roman familial, dirait Freud, dans lequel mes vrais origines n'étaient pas embellies mais poussées au second plan. Un vrai petit fantasme d'orpheline.
Il existait une "ile des fous", j'avoue que le nom manque d'exotisme, qui aurait rassemblé des êtres aux sens aiguisés, différents, une nation insulaire heureuse et autosuffisante. Les enfants de l'île des fous étaient forcés de la quitter en bas âge, je ne sais plus pour quelle raison, rite d'initiation nécessaire au passage à la vie adulte? rôle de messie, de bouc-emissaire, sacrifiant sa tranquilité pour mettre un petit brin de folie dans le monde? impossibilité génétique à vivre sur l'ile ou les uns avec les autres? Je penche pour la troisième solution puisque même avec vous, les insulaires fous ne pouvaient pas se rassembler. Au mieux le temps d'un regard dans un metro, d'une soirée mondaine où ils se croiseraient par hasard, sans comprendre pourquoi, car ils sont amnésiques de leur vie chez les fous, ils se sentiraient bien, chez eux. Et vlouf, le fou repartirait. Inutile de le dire, je me sentais marginale, j'en souffrais, je le cultivais, et les rencontres les plus troublantes ne parvenaient jamais à s'étirer plus d'une soirée.

C'est à ce pays imaginaire d'adolescente perdu que me fait penser cette citation. ... "seulement des notes de terrain pour le réinventer."

lundi 22 décembre 2008

"Dans Paris, il y a une rue;
dans cette rue, il y a une maison;
dans cette maison, il y a un escalier;
dans cet escalier, il y a une chambre;
dans cette chambre, il y a une table;
sur cette table, il y a un tapis;
sur ce tapis, il y a une cage;
dans cette cage, il y a un nid;
dans ce nid, il y a un oeuf;
dans cet oeuf, il y a un oiseau.

L'oiseau renversa l'oeuf;
l'oeuf renversa le nid;
le nid renversa la cage;
la cage renversa le tapis;
le tapis renversa la table;
la table renversa la chambre;
la chambre renversa l'escalier;
l'escalier renversa la maison;
la maison renversa la rue;
la rue renversa la ville de Paris."

Chanson enfantine des Deux-sevres, Paul Éluard, Poésie involontaire et poésie intentionnelle

vendredi 12 décembre 2008

Nouvelle île gigogne

Dans Un train de glace de Jacques Savoie
"Avec la régularité d'une horloge suisse, ce postier du ciel s'élançait de l'aéroport de Cap-aux-Meules pour un vol qui ne durait que 4 minutes 30 secondes. un saut de puce vers la plus petite des îles gigognes. Mais ces voyages ne se faisaient que par beau temps et lorsque la visibilité étaot parfaite."

jeudi 11 décembre 2008

Itinéraire tracé


Mon mémoire de création Salles d’Espérance, suivi de l'appareil réflexif Des îles gigognes, cherche à recréer des espaces ambivalents, où la neutralité fonctionnelle des paysages postmodernes côtoie le baroque de la vie quotidienne.

La partie création rassemble six tableaux d’une quinzaine de pages chacun, qui s’imbriquent dans une structure d’ensemble enchâssée pour suggérer une vision morcelée et plurielle du monde actuel. Les personnages partagent le même vertige généré par la vision généralisée d'un monde global (Iyer) où personnes, marchandises et savoirs circuleraient sans barrières. Ils ont aussi en commun un attachement émotif puissant à un lieu symbolique, l’île. L’espace insulaire devient le symbole d’une ambivalence qui sous-tend tout mon projet, puisqu’il représente cette dérive contemporaine qui rend les personnages fébriles, mais aussi l’attachement à un lieu d’origine fixe que l’éloignement géographique a protégé de la mondialisation.
L'appareil réflexif analyse la capacité du langage artistique à briser la neutralité de ces nouveaux lieux de transit et de déracinement que Marc Augé a nommés les « non-lieux » de la postmodernité. C'est là où l’esthétique relationnelle, théorie destinée à l'origine à des pratiques d'insertion dans l'espace urbain, apporte une posture critique intéressante. Les œuvres qui y sont liées ne discourent pas sur ces phénomènes, mais détournent l’identité purement fonctionnelle des lieux par le biais de réappropriations communautaires continuelles et multiples. De la même manière, je pense que la littérature doit aborder les apories des non-lieux contemporains et montrer le potentiel de subjectivités qu'ils recèlent. On peut alors les envisager comme des portes qui ouvrent sur des espaces de relations multiples, pour lesquels il nous faut inventer de nouveaux récits, car la forme du roman classique est incapable de laisser ouverte à l’infini cette multitude.

La structure de Salles d’Espérance construit cette infinie « compossibilité » du monde (Leibniz). La juxtaposition de contraires, la diversification des points de vue et la mobilité des fragments multiplie les strates de lecture que d’autres enlèvent par peur de l’altérité. L’éclatement de mon récit ne cherche pas à résoudre les paradoxes, « mais juxtapose, c’est-à-dire, laisse en dehors, les uns des autres les termes qui viennent en relation » (Blanchot). Dans un monde où l’on ne croit plus qu’à l’uniformisation de la pensée, où des mots sont menacés d’extinction parce qu’ils « sortent » du cadre idéologique dominant, le rôle de l’écrivain est de maintenir l’ambivalence présente dans chaque sphère du quotidien.

Je ne me situe pas dans la posture de l’écrivain engagé au sens sartrien du terme. Mon projet n’est pas inscrit dans un esprit de militantisme. Il utilise le langage littéraire pour offrir un point de vue critique sur la société. Autrement dit, je montre qu’il est encore possible de produire une multitude de signes subjectifs, même dans un monde aux signes vidés.

dimanche 7 décembre 2008

La psychanalyse par l'excès

"Le masque, c’est l’essence de tous les arts, ajoute Gandalf. L’art, c’est la mise en scène par le faux-semblant, pour que les gens apprennent à voir a travers les exagérations. Sans masque, il n’y a pas non plus de personne. Les gens du commun se trompent quand ils pensent que le masque est un déguisement pour se cacher. Au contraire, c’est une sorte de dévoilement de la nature propre de celui qui se masque, pour mieux se montrer, mieux se découvrir.

Il y a une mode qui veut que les gens doivent se dépouiller de leurs apparences pour connaître leur nature profonde. Les psychiatres gagnent d’ailleurs beaucoup d’argent en diffusant ces sottises religieuses chez les bourgeois trop nerveux. Il faudrait pouvoir leur apprendre plutot le contraire, à se déguiser comme les personnages qu’ils désirent être, à se maquiller pour ressembler davantage à ce qu’ils sont dans leur vie quotidienne. Seulement alors ils comprendraient la valeur profonde de leur propre existence."
Sergio Kokis, Saltimbanques, Montréal, XYZ, 2000, p. 275-277

Le masque, ce n'est pas un appareil de camouflage. Ou plutôt si. Mais en camouflant, il révèle plus que n'importe quelle tentative d'introspection, ce qu'il y a à cacher. Penser au maquillage. Ne pas brouiller toutes les pistes. Relire L'art du maquillage.

samedi 6 décembre 2008

Therapie gigogne

"Les ''thérapies gigognes'' correspondent à un travail thérapeutique de type psychanalytique avec un dispositif pluri groupal (thérapies groupales et thérapies familiales psychanalytiques) dans un agencement institutionnel de type ''poupées gigognes'' permettant des rapports de contiguïté ou d'écart, d'emboîtement ou d'articulation entre les différents espaces psychiques.Ce dispositif particulier permet d'aborder, de mettre en travail et en rapport ce qui est déposé, stocké, dans les espaces institutionnels, avec ce qui est mobilisé et repris dans le travail thérapeutique groupal.Il s'agit donc avant tout d'un travail au niveau des interstices institutionnels, ainsi qu'au niveau des liens et des lieux de jonction, d'articulation ou d'emboîtement des différents espaces groupaux.Les ''thérapies gigognes'' semblent favoriser un certain désenchevêtrement, désintrication, des éléments psychiques résiduels déposés lors de toute prise en charge institutionnelle, en offrant, dans un espace pluri groupal, des groupes thérapeutiques différenciés et appropriés à la reprise du travail d'élaboration, en particulier en TFP."
Sur le site http://www.psychanalyse-famille-idf.net/compte_rendu/conference_8_decembre.htm

jeudi 4 décembre 2008

A l'abordage

"Au 18e siècle, les pirates et les corsaires créerent un 'réseau d'information' à l'échelle du globe: bien que primitif et conçu essentiellement pour le commerce, ce réseau fonctionna toutefois admirablement. Il était constellé d'îles et de caches lointaines où les bateaux pouvaient s'approvisionner en eau et en nourriture et échanger leur butin contre des produits de luxe ou de première nécessité. Certaines de ces îles abritaient des communautés intentionnelles, des mirco-sociétés vivant délibérément hors-la-loi et bien déterminées à le rester, nefût-ce que pour une vie brêve, mais joyeuse.
Il y a quelques années, j'ai examiné pas mal de documents secondaires sur la piraterie,dans l'espoir de trouver une étude sur ces enclaves - mais il me semble qu'aucun historien ne les ait trouvées dignes d'être étudiées (Burroughs et l'anarchiste britannique Larry Law en font mention - mais aucune étude systématique n'a jamais été réalisée). J'en revins donc aux sources premières et élaborai ma propre théorie. Cet essai en expose certains aspects. J'appelle ces colonies des 'Utopies Pirates'"
Ainsi naquirent les TAZ d'Hakim Bey

Prendre ses jambes à son cou

Pas de risque pris. jamais. dans le monde universitaire. des oeuvres qui ne dérangent personne et parlent du prime time avec les mêmes mots. un roman sur le 11 septembre. Beigebeder bis, et elle ose affirmer qu'il avait des qualités littéraires. il y a de la bourse là-dessous. mais ils se rassurent en créant de petits groupes de création. quand on fait tous les mêmes gribouillages, tout le monde applaudit. et même si l'on s'en moque méchamment au dîner, on ne parlera pas, sait on jamais que les critiques permettent à l'autre de s'améliorer.
A l'université, on vous pousse à produire, du texte, des mots, aussi médiocres soient-ils, il faut des lignes. un amoncellement de lignes. ça et la starisation générale, tout le monde a son mot à dire. mais comme dirait Dérida, les idées sont rares. ils sont combien à ouvrir la bouche pour une idée... la nécessité de dire devrait être le seul moteur de l'écriture. c'est mon éthique en tout cas. pas de verbillage. pas de mots dictés par l'égo. ou alors un gaspillage de mots, donc une gratuité, au lieu de cet excés commercial posé sur le papier dans un but indirect, non d'être lu, mais de recevoir une reconnaissance d'estime ou financière de ses paires. quitter l'université. au plus sacramment comme on dit.

mardi 2 décembre 2008

Une ile est une frontière

Je suis étonnée de trouver dans pratiquement tous les textes sur la question de la frontière et de la mondialisation la référence à l'île, soit de façon figurée, comme espace utopique fermé, soit en nomant des îles pour appuyer son argumentation.

Vestiges d'un territoire vierge: L'ile de Surtsey

Dans l'oeuvre Island of an Island (1998-2001), l'artiste Melik Ohanian rend compte de l'émergence, au large de l'Islande, d'une terre volcanique accessible seulement à la communauté scientifique. Un film, une vue panoramique de l'île, est projeté sur trois écrans. Au sol, une fleur lumineuse s'évanouit et se recompose pour dessiner des frontières entre les visiteurs. Elle reproduit le tracé d'une espèce végétale apparue puis disparue sur l'île. Au plafond, cinq miroirs convexes refletent l'image de la fleur et du public. A l'entrée, un livre composé de photo, d'études, d'extraits de presse parus lors de l'éruption du volcan en 1963

"Par définition, toute île est un espace clos, encercleé, mais ici, elle se trouve constamment dépliée, démultipliée par la variété des angles d'approche et par les mises en abyme successives du dispositif prismatique. Si Surtsey, par son caractère unique de territoire vierge, se fait donc le lieu de toutes les projections possibles [...] et si inversement, alors qu'elle échappe à l'appropriation nationale, elle se voit interdite au public, Island of en Island nous la rend justement accessible par fragments, dans son décentrement même. face à l'idée d'une frontière qui distingue, sépare, délimite, l'artiste tente de recomposer le réel, d'en déplacer les contours et d'en faire résonner les accès, tout en soulignant la nature dissolue d'une telle reconfiguration. En ce sens, le non-lieu de Surtsey est l'emblématique 'nulle part' du travail d'Ohanian, celui qui lui permet de signifier toujours plus la relativité même du monde."
Nathalie delbard, "Ici, là-bas, nulle part,e ne même temps: le partage des esapces selon Melik Ohanian", Parachute 120,p. 50

C'est ce que je veux faire. Prendre un espace restreint et borné pour le regarder de tous les points de vue, plutôt que prendre le vaste monde pour parler de la globalisation.

Je veux mon île

"En tant que bon Occidental, on exige une île pour recommencer tout simplement. Les îles désertes sont l'archétype de l'utopie. C'est le fantasme de la tabula rasa, ou bien le postulat d'un deuxième recommencement".
Peter Sloterdijk, dans Alain Finkekraut, Les battements du monde, Paris, Pauvert, , p.160.

Utopies insulaires

"De toute évidence, l'image de l'île est porteuse de multiples visions, mais elle est surtout depuis la modernité l'archétype de l'utopie[...]. Si l'isolement des îles peut laisser croire à un renfermement sur soi dû à la mer qui les sépare du reste du monde, cela ne peut être qu'un accident de parcours; les îles sont naturellement ouvertes aux échanges, à la vie extérieure, aux rencontres et métissages de toutes sortes. En somme, l'individualité intégrale est, ni plus ni moins, l'autre face du cosmopolitisme. Seul, l'individu est capable de se déplacer d'un territoire à un autre, de passer d'un espace à un autre,tout en ayant la force de marquer par son existence sa propre frontière."
André-Louis Paré, "Espaces, paysages, frontières", Parachute 120, p. 112.